Rencontre [PV : Hassan Al-Kartal]

[Désolé pour la piètre qualité du poste, mais il est tard.]

C'est au milieu de la nuit que j'ai quittée notre repaire principale, à Jérusalem. Le ciel était clair, parsemé d'étoiles et la lune baignée la cité d'une pale lueur fantomatique. Vêtu de mon habituelle tenue noire j'ai traversé la ville aussi silencieusement que possible, sautant lestement d'un toit à l'autre, aussi agile qu'un chat. J'avais la chance de posséder une vue bien meilleure que celle du commun des mortels, ainsi je pouvais me déplacer avec aisance dans la pénombre, mais en contreparties mes iris avaient prit une teinte mordorés et bien que cela ne me gênait point, c'était tout de même un signe particulier avec lequel mes ennemis pouvaient facilement m'identifier ... et c'était sans compter la blancheur de ma chevelure, celle-ci étant pareil à la neige.

Nous autres Assassins Renégats ne possédions pas de tenues « officielles », le noir n'était pas notre couleur et le blanc non plus. Le gris était assez présent à bien y penser ... en fait chacun s'habillait comme il le souhaitait. Mais tous devait avoir sur lui notre symbole afin de pouvoir être reconnu ... celui-ci n'était pas spécialement visible et les Assassins de Masyaf ne le connaissait pas ... ou pas encore. Par ailleurs, c'était là-bas que je me rendais. Tôt dans la journée, j'avais reçue un pigeon de la part d'Adria. Celle-ci tenait à me voir rapidement alors après avoir réglé les affaires urgentes, j'avais décidé de partir.

C'est pour cette raison que je me retrouvais dehors alors que minuit était passé, me déplaçant dans le noir telle une ombre. Mon capuchon était cependant abaissé et ma chevelure couleur de neige semblait luire d'une étrange couleur argentée sous les rayons de l'astre lunaire. Bien que je croisais des gens sur ma route, surtout venu du bas peuple, personne ne vint me chercher des problèmes et je pus gagner les écuries de la cité sans anicroches.

Même de loin, j'ai tout de suite repéré Artedia, ma jument. Sa robe était aussi sombre que la nuit, mais son front était marqué d'un losange blanc. Artedia était robuste et endurante, avec elle j'arriverais à Masyaf rapidement. Je pris néanmoins le temps de la seller et de lui offrir une friandise qu'elle sembla grandement appréciée. Après quoi, je grimpai souplement sur son dos et partit au trot sur la route menant à la forteresse des Assassins. Cela faisait quelques temps que je n'y étais pas allée. Ces derniers temps, j'avais préférée rester à Jerusalem afin de m'occuper des miens, j'en avais profité pour entraîner quelques jeunes nouveaux.

Pendant le trajet, je me suis mise à somnoler et plusieurs fois je fus brusquement tirer de mes songes par quelques bruits peu rassurant, néanmoins peu avant le levé du soleil je rencontrai trois brigands. Il fut aisé de les neutraliser et je repris rapidement ma route, laissant les corps derrière moi après les avoir dissimulés dans les buissons.

Mon arrivée à Masyaf ne fut guère remarquée. J'arrivai en même temps qu'un petit convoi ce qui me permit de passer assez rapidement les portes de la ville après avoir attaché Artedia près des autres cheveux tout en m'assurant qu'elle ait de l'eau afin de se désaltérer. Les journées étaient chaudes ces derniers temps. J'ai rapidement retrouvé Adria à notre point de rendez-vous habituel et elle me livra quelques informations sur les Assassins avant que nous ne passions à bon moment ensemble.

Plus tard dans la journée, après l'avoir quitté, j'ai décidé de me rendre sur la place centrale de la ville. En cette heure, celle-ci pullulait de badauds et je me trouvais un coin un peu à l'écart d'où je pouvais observer les alentours sans réellement attirer l'attention. En passant près d'un mendiant je lui tendis une pièce avec un sourire à son encontre, puis m'appuya contre un mur situé à l'ombre. Mon regard, voilé par quelques mèches de cheveux, se porta alors sur la forteresse qui dominait la ville. Une chose était claire en ce bas monde : les Assassins étaient bien mieux lotit que nous et la vision de ces hauts remparts ramena quelques souvenirs à la surface de mon esprit ... néanmoins je les balayais rapidement, je ne voulais plus y penser.

[C'est tard pour toi, 1h du matin ? ^^ ]

Masyaf s'était montrée paisible en cette journée particulière. Tandis que tous ses frères et sœurs dormaient dans la forteresse, Hassan, lui, réfléchissait au clair de lune sur la plus haute tour de la Fraternité. Cela faisait exactement 2 ans jour pour jour qu'Altair, son mentor, son père s'était éteint. Et jusqu'à son dernier souffle, il avait une totale confiance en son dernier initié. Il l'avait en effet mené jusque dans sa bibliothèque secrète, celle qui est impénétrable sans les clés appropriées pour lui faire ses adieux, les autres n'ont pas eu cette chance puisqu'il avait demandé à rester ici à jamais tandis que le nouveau meneur des Assassins en était ressorti, anéanti par la tristesse du moment.

En début de soirée, alors que les premiers rayons du soleil commençaient à s'évanouir derrière la première montagne à l'horizon, il avait rassemblé tous les Assassins afin de déclarer un discours de commémoration, tout comme il l'avait fait l'an dernier ainsi que celui d'avant. Tous avaient répondu présent bien sûr. Et chacun, tête baissée, portait un hommage au plus grand et sage Assassin que ces terres aient jamais connu. Pour conclure, ils avaient récité le crédo pour lequel il s'était battu toute sa vie ainsi que sa citation favorite. Une fois la place centrale de la forteresse vidée de l'afflux de capuchons blancs, il était allé seul sur sa tombe vide y déposer une plume blanche avant de repartir à ses occupations, et elles ne manquaient pas.

Le temps de la réflexion avait assez duré. Le chef des Assassins est aussi et avant tout un homme et il n'est pas exempté de sommeil. Quittant son perchoir, il regagna une plate-forme en contrebas d'où il se jeta de son rebord comme un aigle fondant sur sa proie. Sortant de la pile de foin, il se débarrassa des brins s'étant accrochés à lui d'un geste vif mais souple avant d'entrer dans le château lui -même avant de longer l'enceinte sud pour gagner les chambres. La sienne était comme toutes les autres- il ne méritait pas plus de confort que ses confrères, leur courage étant identique-, mis à part qu'il disposait d'un bureau caché dont l'entrée était fondue dans le mur, mur qu'il faut déplacer pour y accéder. Ne perdant pas de temps supplémentaire, il rejoint rapidement les bras de Morphée.

Les heures passèrent, quatre pour être précis et les premier fils dorés du soleil vinrent caresser les vitres, injectant suffisamment de lumière pour le réveiller. Il revêtit sa tenue, qu'il avait hérité d'Altair, ainsi il continuait de faire vivre son mentor et à lui faire honneur. Comme d'habitude ces temps-ci, il sortit du château sans même avoir mangé quoique ce soit. Les matins étaient très ritualisés. Pendant que les plus fatigués emmagasinent un peu plus de sommeil, les autres se préparent à partir en excursion ou comme beaucoup, dans le but de se faire remarquer par le nouveau chef, font des duels dans la cour d’entraînement. Tous savent qu'Hassan, qu'on appelle souvent Kartal, littéralement « Aigle » en Turc, en référence à ses origines et à son défunt mentor, n'a actuellement pas de disciple sous son aile.

De ce fait, bon nombre de novices et d'apprentis cherchent à attirer son attention lors de son passage quotidien sur le terrain d’entraînement. Hassan n'est pas dupe et sait pertinemment qu'ils se rassemblent ici dans l'optique d'être choisi mais il sait également que sa simple présence motive, si bien que certains se mettent à trembler, non pas de peur de lui mais de crainte de faire mauvaise impression. D'apparence impassible, il est pourtant respecté non pas parce qu'il est craint mais bien parce qu'il est pour beaucoup un modèle à suivre. Joueur également, il prend malin plaisir à pimenter les duels en imposant par exemple que les combattants se lient les mains. Tous les combats, malgré ses interventions, se déroulent toujours dans le plus grand respect, le but étant d'apprendre et non de vaincre.

Tandis qu'il observait le duel assaisonné de sa nouvelle règle du jour, il aperçut dans son angle de vision une silhouette qu'il n'avait pas l'habitude de voir à l'extérieur dès le matin. Abandonnant le premier rang des spectateurs, il suivit l'Assassin qui rentrait rapidement vers le château. Il s'approcha suffisamment pour pouvoir saisir son capuchon et le faire tomber. Comme il le pensait, il s'agissait d'Adria, l'une de ses plus fidèles sœurs qui, surprise et se croyant agressée, se retourna et fendit l'air de sa lame. Hassan dut bondir en arrière pour éviter ce geste défensif qui visait sa gorge.
Remarquant son erreur, la jeune femme lui adressa ses excuses. Il lui sourit en s'excusant à son tour pour lui avoir fait peur et en lui saisissant le bras, il lui demanda pourquoi elle était en dehors de la forteresse plutôt que de vaquer à ses occupations habituelles. Sa réponse hésitante et bafouillée le laissa perplexe et il trouva cela assez étrange. Il était rare qu'Adria sorte et encore plus de si bonne heure.

Hassan estima qu'une petite enquête s'imposait. Sans plus tarder il quitta à son tour l'enceinte fortifiée de la Fraternité, scrutant à chacun de ses pas chaque élément ou individu suspect. Passant de toit en toi plutôt que d'emprunter le chemin de gravier parcourant toute la ville, il se posta à l'affût. Tout semblait parfaitement normal et calme mais il avait pourtant le sentiment que quelque chose ne tournait pas rond. Il ne tarda pas à avoir raison. Une autre silhouette qu'il avait, par le passé, l'habitude de croiser se tenait un peu plus loin. Il était à assez bonne distance pour ne pas avoir été repéré et il descendit de son observatoire avant de contourner le marché occupant la place afin d'arriver dans le dos de celle qu'il avait repérée.

Il avait pris toutes les précautions pour ne pas perdre l'effet de surprise. Il était arrivé discrètement en dehors hors de son champ de vision et il prit l'audacieuse initiative de s'asseoir sans faire le moindre bruit tandis qu'elle regardait ailleurs.

« Eh bien, cela faisait longtemps que je ne t'avais pas vue, Elena. Qu'est-ce qui t'amène si près de ton ancien chez-toi ? »

Engagea-t-il simplement tout en faisant tomber son capuchon pour dévoiler son visage.

Elena avait longtemps été le meilleur Assassin sous les ordres d'Altair, après Hassan. Une rivalité avait toujours été présente entre eux mais en aucun cas l'un ou l'autre n'avait cherchait à élever cette lutte amicale au rang de réelle compétition qui aurait coûté en honneur à l'un des deux.

Et malgré son attitude détendue, Hassan craignait qu'elle ne réagisse vigoureusement à son intervention après ce qu'il s'est passé...

Je ne pouvais m'empêcher penser à Adria. Cette belle jeune femme prenait tellement de risque pour m'aider, moi et les miens ... Il ne se passait pas une heure sans que la crainte vienne empoigner mon coeur. S'il devait lui arriver quelque chose, je crois que jamais je ne me le pardonnerais. Sans elle, je serais morte à l'heure qu'il est, exécutée par mes anciens frères pour un meurtre que je n'avais pas commis ... mais elle était la seule à m'avoir cru alors que même mon ancien maître m'avait tourné le dos ! Même après toutes ces années cela me révoltait encore ... Je me demandais parfois si sans Adria je serais encore en vie ou non ... probablement pas en tout cas. Cette dernière était un peu plus grande que moi et possédait de longs cheveux noirs dont elle prenait le plus grand soin. Sa peau était claire et une grande cicatrice barrait son épaule gauche ... Je me souvenais très bien de celle-ci car je la touchais toujours, elle aimait lorsque je faisais cela.

Soupirant, j'ôtais d'un geste vif quelques mèches de cheveux bloquant ma vue puis, porta ensuite mes doigts jusqu'à mon cou et caressa le pendentif qui s'y trouvait. Il s'agissait de notre symbole, à nous renégats. Il s'agissait d'une épée surmontée d'une paire d'aille et sa garde était faite de quatre losanges. Néanmoins, je replaçai rapidement le pendentif à sa place, entre mes seins. Je ne tenais pas non plus à ce que tout le monde le voit ... bien entendu, il n'était pas encore vraiment connu si ce n'est à Jérusalem, mais prudence est mère de sureté. Je vis un mouvement dans mon dos du coin de l'oeil, mais je n'y prêtai guère attention, car un marchant ambulant vint vers moi et me proposa je ne sais qu'elle babiole sans intérêt. Insistant, il me fallut quelques minutes pour qu'enfin il me laisse en paix... C'est alors qu'une voix d'homme me fit sursauter bien malgré moi. Je serrais les dents et fermais les yeux quelques secondes, je me trouvais bête d'avoir réagi si ... brusquement. Montrer à cet homme qu'il m'avait surprise n'était vraiment pas malin. Néanmoins, je me retournais vers lui et il me fallut quelques secondes pour mettre un nom sur ce visage. Il possédait des cheveux noirs qui lui tombaient dans la nuque et sur les oreilles, des yeux marron foncés, presque noirs et une barbe de trois jours ... Il avait également une cicatrice à l'arcade et une sous l'oeil. Ce fut ces deux cicatrices qui me permirent de le reconnaitre. Hassan Al-Kartal. J'eu tout de suite envie de lui planter ma lame dans le coeur, mais je me retins de le faire. Tuer celui qui était désormais le chef des Assassins dans sa ville n'était guère une bonne idée, bien que celle-ci soit très tentante. Lui, par contre, ne devait pas savoir ce que j'étais devenue. C'était déjà ça de plus.

Venant m'asseoir à côté de lui, je posais mon regard mordoré sur sa personne en me forçant d'avoir l'air aimable, bien qu'il devait forcément se douter que je lui en voulais énormément. Après tout il était l'une des personnes qui avait voté pour ma mort de ce que je savais ... Et nous avions toujours étaient rivaux.

« Des affaires qui ne te regardent aucunement, Hassan. Comment peux-tu te tenir devant moi alors que tu as voté pour ma condamnation à mort ? Je devrais te trancher la gorge pour cela… »

Je me penchais légèrement en avant et mon pendentif quitta l’abri de ma tenue, cependant je le remis rapidement en place.

« Qu’est-ce qu’un chef comme toi fais hors de sa forteresse ? N’as-tu pas d’autre chose à faire ? »

Pour une fois, et cela s'avérait rare, voire exceptionnel, Hassan avait le visage découvert, à la vue de tous les yeux l'entourant. Ceux d'Elena les premiers.
Il avait pris un risque en agissant ainsi. L'événement de tout à l'heure avec Adria aurait très bien pu se reproduire et là, il n'aurait reçu aucune excuse. C'était un risque à prendre, et pas des moindres surtout si l'on considère le fait qu'il n'y avait à rien gagné, si ce n'est de confirmer ses talents en approche silencieuse. Par chance, il n'avait pas eu à esquiver une attaque réflexe. Gardant une attitude sereine, il posa ses avant-bras sur ses cuisses.

Ayant observé chacun de ses gestes, il ne put pas passer à côté de sa manie concernant le pendentif qu'elle portait autour du cou et qui trouvait sa place entre ses attributs féminins. Il sentit également lorsque son regard se posa sur lui, le scrutant pour se souvenir. Il s'agissait bien plus que d'un coup d'oeil et il était incroyablement pesant. Ne montrant rien de son ressenti, le Chef des Assassins lui rendit son regard, analysant à son tour ses nouveaux traits de visage, bien qu'ils n'aient pas beaucoup changé. Ce qui attira le plus l'oeil d'Hassan fut sans conteste ses cheveux d'ivoire qui donnaient ainsi à son ancienne rivale toute sa pureté et qui créaient entre eux un réel contraste.

Hassan ne quitta pas son emplacement lorsque l'exilée prit place à ses côtés. Malgré les apparences qu'elle laissait filtrer, il sentait bien qu'elle se faisait violence pour ne pas lui ôter la vie et ses mots ne firent que confirmer sa pensée. Il savait donc de cette façon qu'il ne pouvait pas lui faire confiance. Quant vint le moment de répondre, il planta son regard dans le sien tout comme il planterait sa lame dans la jugulaire de son ennemi.

Il était temps de lui expliquer ce qu'il s'était réellement passé et ce qui avait motivé son vote.

« Tu as toutes les raisons de m'en vouloir si tu t’appuies uniquement sur ce que tu sais, c'est-à-dire l'avis que j'ai exprimé quand nous avons débattu sur ton sort après l'accident. Tu peux rester campée sur tes positions ou bien m'écouter t'expliquer.
Souviens-toi, à l'époque, Altair m'avait délégué la moitié de ses responsabilités pour m'apprendre à devenir un chef digne et sage. Lorsqu'il exigea que tu sois exécutée, il me demanda mon avis. Crois-moi, c'est sans nul doute la plus difficile décision que j'aie jamais eu à prendre. D'un côté, Altair voulait faire un exemple, c'était justifié car nos rangs s'éclaircissaient dangereusement entre les pertes en mission et les trahisons. Je dirigeais à ses côtés et aller à son encontre aurait été perçu comme un affront et un manque de respect. Et de l'autre côté, je savais que tu n'y étais pour rien. Je te connaissais, j'avais confiance en toi comme si tu étais ma propre sœur de sang.
Si j'avais choisi l'autre option, tu aurais dû subir la perte de confiance de tous nos frères et sœurs, tu te serais retrouvée seule. Et de plus, il en aurait été de même pour moi. Et à la mort d'Altair, tous auraient été divisé car quelqu'un qui laisse couler le sang de ses frères sans réagir ne mérite pas de les mener. Tout le monde y aurait été perdant. En faisant ce que j'ai fait, je me suis assuré de garder la Fraternité unie et soudée et je savais que tu réussirais à t'enfuir. J'ai pris ma décision à ce dilemme en choisissant le bien de tous.
Je ne demande pas ton pardon, je veux juste que tu saches qu'à aucun moment je n'ai voulu ta mort et que je regrette que nous ayons dû en arriver là. Tu as toujours mérité ta place parmi nous. »

En reprenant son souffle, il prit l'initiative de déposer sa main sur l'épaule de son ancienne sœur d'armes.

« Il y a toujours quelque chose à faire quand la paix est menacée mais je cherchais à comprendre ce que faisait Adria en dehors de l'enceinte si tôt dans la journée, ce n'est pas dans ses habitudes et je sais que vous étiez proches. Serais-tu au courant de quelque chose ? »

Se levant, il tendit sa main à la jeune femme.

« Et toi, que deviens-tu alors ? Si nous allions en discuter autour d'un verre dans un endroit discret ? Si quelqu'un venait à te reconnaître, nous aurions tous deux des ennuis. »

Assis côte à côte, il planta son regard dans le mien. Peut être espérait-il que je tourne les yeux, mais je ne fis rien de tel. Je me contentais de l'observer de mes prunelles dorées, attendant la suite. Celle-ci ne tarda guère et Hassan commença à s'expliquer sur son vote. De plus, le fait qu'il qualifie cela « d'accident » me révolta, mais une fois de plus je n'en montrais rien.

Je me souvenais bien de cette époque, j'avais été heureuses parmi mes anciens frères et soeurs. Et je me savais bien qu'Altaïr avait délégué nombre de ses responsabilités à Hassan. A mon ancien frère ... Mais plus il parlait et plus je comprenais sa décision, bien que j'étais toujours furieuse et que l'envie de lui planter ma lame dans le corps me démangeait toujours autant ... Faire de moi un exemple alors qu'il me savait innocente ? Mais au fond rester parmi eux en ayant perdu toute leur confiance ... Cela aurait été totalement inutile. Finalement Hassan avait peut-être fait le bon choix, mais je n'en restais pas moins en colère, bien que celle-ci soit contenue. Savait-il seulement que je ne devais mon salut qu'à Adria ? Si elle n'avait pas été là, jamais je n'aurais réussi à m'échapper.

D'un mouvement brusque de l'épaule, je chassais sa main de celle-ci. Savait-il pour Adria et moi ? Apparemment non, mais il avait peut-être des doutes. Je ne pouvais lui dire qu'elle était sortie plus tôt pour me voir, car s'il apprenait la place que j'occupais parmi les Renégats, elle allait probablement être exécutée pour trahison avant même de comprendre ce qui se passait et je ne pouvais la trahir. Je le laissais se lever tandis que je restais assis. J'entrepris alors de lui répondre le plus naturellement du monde, faisait passer ce mensonge pour la plus pure des vérités.

« Je n'en ai pas la moindre idée. Je n'ai pas revu Adria depuis longtemps. »

Je me levais à mon tour avec un petit rire. Pensait-il réellement que je sois assez bête pour le suivre dans une quelconque taverne ? Il avait raison sur une chose, si j'étais vu ici je risquais gros, alors s'il tenait tant à me parler, il me suivrait. Dans le cas contraire mon retour à Jerusalem serait avancé de plusieurs heures, mais qu'importe.

« Je ne suis pas assez bête pour m'asseoir tranquillement dans une taverne en espérant ne pas être remarqué. Ma chevelure et mes yeux sont des signes distinctifs, l'aurais tu oublié ? Ou comptes-tu me capturer et me faire exécuter ? »

Sans un mot de plus, je tournais les talons. Qu'il me suive ou non, je n'en en avais rien à faire. Je quittais donc la place centrale de la ville en direction des portes de celle-ci où je retrouvais Artedia à l'endroit où je l'avais laissé. La tirant par la bride, je remontais la route jusqu'à un éboulement rocheux offrant un abri plus ou moins discret. Je grimpais même une petite pente et finissais ainsi par surplomber le chemin tout en étant dissimulé par un gros rocher. Laissant ma jument brouter quelque brin d'herbe, je m'asseyais en tailleur dans l'herbe. Hassan m'avait suivit, tant mieux.

« Pour répondre à ta question de tout à l'heure, je me suis trouvé un but. Et ce but fera surement de nous des ennemis... Valek et les deux autres Assassins qui m'ont retrouvée, je veux leurs vies. »

Son regard fixe rivé sur Hassan fit resurgir de vieux souvenirs. Ceux d'un passé qu'Elena semblait avoir délibérément oublié. Ce même regard visant volontairement celui de l'autre lorsqu'ils se croisaient devant le bureau d'Altaïr. Ils étaient jeunes, ils étaient idiots. Suffisamment en tout cas pour jouer aux faux ennemis et pour ensuite rire de bon cœur ensemble tout en partageant un repas. Sans s'en rendre compte sur le moment, Hassan esquissa un sourire tandis qu'il rêvassait avant de se reprendre.

Certainement sans vouloir à son tour, son interlocutrice afficha différentes expressions sur son visage. Les plus flagrants exprimaient une colère refoulée, le doute et la prise de conscience. Le chef des Assassins ne laissa rien paraître alors qu'il remit son capuchon à sa position habituelle afin que celui-ci l'abrite en créant une ombre sur ses traits.

La réaction impulsive de la jeune femme lorsqu'il créa un contact ne l'étonna guère, elle avait toujours été de ceux qui réfléchissent avec le coeur et donc avec les émotions. Néanmoins, le fait qu'elle n'ait pas réagi de manière plus agressive était un point positif non négligeable. Cela prouvait que même si elle continuait à se montrer méfiante et distante, elle lui faisait encore suffisamment confiance pour le croire.

La réponse à sa dernière question ne le satisfit pas. En effet, tout le poussait à croire que l'attitude étrange d'Adria était liée à Elena. Premièrement, le fait qu'elle soit sortie de la forteresse de si bon matin alors que de l'occupation l'y attendait. Ensuite, le fait qu'elle se soit montrée pressée au moment de rentrer et qu'elle ne voulait pas être vue. Et enfin, sa réaction défensive impulsive. Pour Hassan, cela ne relevait pas d'une simple coïncidence.

L'ayant fait patienter quelques instants, la demoiselle finit par se lever et il comprit tout de suite pourquoi il l'avait fait patienter. C'était la méfiance, presque paranoïaque, qui la guidait. Il ne put s'empêcher d'afficher un sourire moqueur à l'écoute de ses mots.

« Qui te parle de taverne ? Je pensais aller réclamer un verre aux voleurs en guise de récompense aux derniers services que je leur ai rendus. Leur antre est si malfamée que nulle personne pouvant nous reconnaître ne s'y trouverait. Tu me connais pourtant, je ne prônerais pas la sécurité si je ne comptais pas l'appliquer. Et pourquoi voudrais-je ta mort aujourd'hui alors que je ne l'ai pas voulue par le passé ? »

Laissant à nouveau le silence régner, il se contenta de suivre son ancienne sœur qui le mena aux portes de la ville. Il put ainsi reconnaître Artedia dont il s'approcha pour lui caresser la crinière tout en lui glissant quelques mots à l'oreille.

« Alors fripouille, tu as l'air en forme. »

Sa propriétaire décida de les emmener un peu plus loin tous les trois. Suivant celle-ci, Hassan finit par prendre place non loin d'Elena, assis les bras autour de ses jambes.

Songeant à la situation actuelle, il rit intérieurement. Il fallait avouer que les circonstances dans lesquelles il se trouvait le permettaient. Il était assis à proximité d'une personne qui souhaiterait le voir mort et ce, dans un endroit isolé où un crime pourrait être commis en toute tranquillité. Pour beaucoup, ce serait de la pure folie, Hassan, lui, voyait plutôt cela comme un jeu. Un jeu dangereux, cela ne fait pas l'ombre d'un doute, mais il était joueur.

« Quel genre de but ? »

Il laissa un court silence, prit une inspiration et répondit à nouveau.

« Crois-tu être en mesure d'exiger quoique ce soit ? Tu ne peux ni ne dois réclamer la mort de trois personnes. Tu ne voudrais pas que ton histoire se répète, n'est-ce pas ? Je ne pourrai tolérer qu'on veuille prendre la vie de mes frères innocents, à moins qu'ils aient quelque chose de grave à se reprocher qui n'a aucun lien avec leur témoignage et que tu puisses le prouver. »

[Pas super, sorry, mais je l'ai fais ! xD]

Assise dans l'herbe, la jeune femme observait Hassan faire de même, toujours sur ses gardes. Elle était prête à lui sater à la gorge, c'était certaine, mais d'un autre côté elle ne le voulait pas mort, pas pour le moment, pas si ce n'était pas nécessaire. Lorsqu'il répondit néanmoins, la jeune femme serra les poing et se pencha quelque peu toujours en avant, demeurant néanmoins assise. Tout ce que Elena avait, c'était ce qu'elle avait déjà exposé au chef des Assassin avant qu'il soit décidé qu'elle serait exécutée... Elle n'avait donc pour ainsi dire absolument rien, aucune preuve si ce n'est ses doutes...

« Si tu refuses, je devrais faire sans ton accord ... »

Un bruit de pas attira l'attention de la jeune Assassin qui tira aussitôt ses deux dagues. Quelques secondes plus tard, deux hommes en blanc arrivèrent, deux assassins, deux frères d'Hassan. Derrière leur capuchon, il lui sembla reconnaître l'un d'entre eux. Eux même avaient leur épée au clair, près à pourfendre la jeune femme … car c'était clairement Elena qui était menacée. L'un d'eux prit la parole, s'adressant au Chef des Assassin.

« Maître, que faites vous avec cette femme ? N'êtes vous pas au courant ? »

Elena n'attendit guère plus longtemps et fondit sur le premier homme, qu'elle transperça aisément. Il était hors de question que son secret, que son statut de chef des assassins renégats ne soit révélé à Hassan contre sa volonté … Le second homme fut néanmoins capable de la mettre à terre en la touchant à la cuisse, rien de grave mais c'était néanmoins assez douloureux. La jeune femme lança un couteau qui s'enfonça dans la cuirasse en cuir de l'homme sans faire de réel dommage.

« Maître... cette femme... elle dirige les Assassins Renégats, elle a trahit notre Ordre et tué les nôtres, comment pouvez vous la laisser en vie ? »
« Tu ignores tout de nous, jeune homme. »

Se remettant sur ses jambes en passant outre la douleur, Elena parvint à le supprimer en utilisant l'effet de surprise, elle se tourna ensuite vers Hassan en le menaçant de son arme. S'ils devaient se battre, la jeune femme n'allait sûrement pas pouvoir tenir … mais elle ne se laisserait pas capturer, elle préférait mourir.

« Ne m'approches pas, Hassan. Reste où tu es ... »

Le Maître Assassin n'arrivait pas réellement à déterminer pourquoi, à cet instant donné, il avait une soudaine envie d'afficher un sourire satisfait. Était-ce de voir Elena retenir son bras ou bien de savoir que si elle venait à tenter quoi que ce soit, elle verrait son coup se retourner contre elle. Quoiqu'il en soit, Hassan n'avait aucunement l'intention ni de la blesser ni de la tuer. Bien que tout semblait les séparer aujourd'hui, le leader des Assassin conservait à l'esprit que la jeune femme se trouvant à ses côtés était loyale, respectable et honnête. Mais lui ferait-elle encore suffisamment confiance pour l'être encore avec lui ? Voici une question à laquelle il ne trouvait pas de réponse.

Distrait et pensif, le jeune homme observait le chemin voisin où des grains de sable dansaient gracieusement à chaque coup de vent et ne répondit pas lorsque son interlocutrice répliqua. Mais cela ne l'empêcha pas de prendre note de ces dires, affichant un sourire moqueur en décelant son assurance sans limite dans le son de sa voix. Voilà quelque chose qui n'avait pas changé chez elle et qui serait certainement un point sur lequel s'appuyer.
Mais voilà que de l'agitation, couverte par ses pensées, approchait. Il reconnut deux de ses frères revenant d'une patrouille près du village voisin. Tandis qu'Elena, par réflexe impulsif, sortait eux lames courtes, Hassan, lui, se leva tout en remarquant un échange de regards et n'eut pas le temps de leur dire, d'un geste de la main, de ne pas intervenir que l'un d'eux prenait la parole. A peine eut-il finit sa phrase que l'ex-Assassin lui prit la vie d'un coup fulgurant à la gorge. Le second avertit le Chef des Assassins de l'identité réelle d'Elena après l'avoir profondément blessée à la cuisse. Assassins Renégats ; Hassan avait déjà entendu ce nom. Surtout des rumeurs qui les présentent comme de farouches combattants plutôt que de protecteurs du peuple comme le sont les véritables Assassins et à cet instant, il ne put réagir.
Deux de ses hommes venaient de périr sous ses yeux de la main d'une prétendue traîtresse mais il ne pouvait simplement répliquer, Elena n'était pas n'importe qui et méritait le bénéfice du doute. Et ce, même si c'était désormais lui qui se voyait menacé. Il leva les mains pour montrer sa non-intention de lui faire du mal tout en surveillant le moindre de ses gestes. Il savait pertinemment qu'au moindre écart de conduite, elle n'hésiterait pas un seul instant à s'en prendre à lui, et bien qu'il s'y attendait désormais, l'exilée qui lui faisait face restait, même blessée, un adversaire dangereux. A la manière d'un animal qui prend peur et se retrouve dos au mur, prêt à mordre dans le seul et unique but de tuer pour survivre, Elena pointait sa lame à destination de la gorge d'Hassan. Ce dernier surveillait régulièrement la blessure par lequel s'échappait un flot continu de son liquide vital. Il fallait agir sans plus tarder. Il choisit d'approcher d'un pas et ce, le plus lentement du monde avant de la fixer droit dans les yeux d'un regard rassurant.

« Elena, je comprends ta peur mais je sais aussi qui tu es et ce que tu vaux. Là ce n'est pas toi, dépose ton arme et tout ira bien.. »

Il tendit l'une de ses mains en direction de celle armée de son potentiel bourreau tandis qu'il s'accroupit en s'appuyant sur son autre main. Ne lisant aucune intention de se rendre dans la pupille de la jeune femme, il baissa sa main et se redressa.

« A ce que je vois, tu ne me laisses guère le choix. Pardon, Elena.. »

Sans plus attendre, il lui envoya le sable- qu'il a discrètement récupéré en s'abaissant- au visage et profita de l'effet de surprise pour fondre sur elle afin de lui asséner un coup de poing au niveau de sa jambe blessée. La Renégat tomba au sol et le Maître Assassin la plaça immédiatement sur le ventre, se saisit de ses deux poignets et les rassembla dans une seule de ses mains tout en s'asseyant à califourchon sur elle, l'immobilisant ainsi complètement. Il sortit ensuite une fiole de l'une de ses sacoches, l'ouvrit et lui fit respirer de force. Celle-ci contenait un puisant anesthésiant volatile. Après quelques secondes, la fougue de la jeune femme commença à s'estomper et au fur et à mesure qu'elle sombrait dans un profond sommeil, Hassan relâchait sa prise. Une fois totalement endormie, il ne perdit pas un instant de plus et siffla rapidement plusieurs fois. Cinq Assassins accoururent alors. Il s'agissait des meilleurs de ses frères et sœurs, ceux qui lui vouent une confiance sans limite, qui lui sont également les plus loyaux et qui partagent ses secrets. Il s'adressa à eux.

« Inutile de vous présenter je crois. Je vais m'occuper d'elle, personne ne doit savoir qu'elle est ici, surtout pas Adria. Dégagez-moi la voie jusqu'à mon bureau et récupérez les corps de nos frères afin de leur offrir une sépulture qui soit à la hauteur de leur courage. »

Les cinq capuchons blancs se séparèrent et exécutèrent les ordres du capuchon noir alors que ce dernier s'agenouillait avant de déchirer un lambeau sa sous-tunique afin d'en faire un garrot enserrant la jambe de la jeune femme. Il la prit ensuite dans ses bras et l'emmena jusqu'à destination, la voie étant libre grâce à son groupe d'élite.
En réalité, en parlant de son bureau, Hassan désignait celui se trouvant dans sa chambre et non pas le Bureau où il planifie les activités de l'Ordre. Il ouvrit la porte fondue dans le mur opposé à celui que borde son lit et referma derrière lui pour ensuite déposer la belle aux bois dormant sur le canapé longeant la fenêtre. Il n'était pas des plus confortables mais il était plus sûr de la cacher ici car seul les cinq connaissent ce bureau secret. Il fit ensuite une ouverture dans la tenue d'Elena afin de lui faire un pansement digne de ce nom mais qui ne suffirait toutefois pas. Il ne put ensuite qu'attendre son réveil, restant auprès d'elle, jour comme nuit, autant que possible.
Dans les rares moments où il dut s'absenter, il demandait à ce que l'un des cinq surveille sa chambre au cas où la blessée se réveillerait et déciderait, même dans son état, de partir. Partir et non s'enfuir, car Elena n'était pas une prisonnière. Le Chef des Assassins prenait de gros risques et il était probable que la jeune femme ne le remercie aucunement par la suite mais elle le méritait tout de même, en souvenir du passé...

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